Le groupe de rock archétypal. Formé par Mick Jagger (26-07-43), Brian Jones (28-12-43) et Keith Richard (18-12-43) en 1962. Tous trois avaient déjà pas mal fréquenté le milieu du blues et du rythm and blues en Angleterre, en particulier le Blues Incorporated de Cyril Davis et Alexis Korner. Parmi les premiers membres du groupe figurait le guitariste Dick Taylor – plus tard chez les Pretty Things. La première chance des Rolling Stones (un nom emprunté à un morceau de Muddy Waters) sera la rencontre de leur second manager, Andrew Loog Oldham. Celui-ci comprit tout de suite le parti à tirer de ce groupe de jeunes gens un peu débraillés. Il encouragea chez eux toutes les tendances à la révolte, à la provocation, verbale ou sexuelle, au dévergondage complet. Les Stones acquièrent ainsi une réputation de mauvais garçons, opposée à l’image un peu sainte-nitouche des Beatles. Ce sont pourtant ces mêmes Beatles qui leur donnèrent leur seconde chance, avec un morceau signé Lennon-McCartney, « I Wanna Be Your Man », qui deviendra leur premier tube.
Entre temps, ils ont recruté le bassiste Bill Wyman (24-10-36) et le batteur Charlie Watts (02-06-41). Commence alors une carrière qui, jusqu’à nos jours, a connu bien peu de temps morts. Dans leurs premiers albums, les Stones jouent encore beaucoup les compositions de Chuck Berry, Bo Diddley et des grands du rythm and blues – Sam Cooke, Solomon Burke…- Certains de ces morceaux sont parfois bannis de leur répertoire dès qu’ils abordent le continent américain comme le « Little Red Rooster » de Howlin’ Wolf. Suprême hypocrisie du système blanc, qui ne tolère un certain blues aux images hardies qu’à la condition qu’il soit chanté par des noirs. Pour des raisons de commodité – et de business – leurs albums ne compteront plus, après 1966, que des titres signés Jagger-Richard. Lesquels connaîtront un succès considérable ; d’abord, en 1965, « The Last Time » et « Satisfaction » (un classique immortel), puis, en 1966, « Get Off Of My Cloud », « Paint it Back » et « 19th Nervous Breakdown ».
C’est alors qu’ils sont au sommet de leur popularité que l’establishment se venge plutôt bassement, de morveux qui les défient depuis déjà cinq ans… et avec eux des milliers de jeunes gens désireux de faire changer les choses. En 1967, Jagger et Richard, puis Jones, sont tout à tour arrêtés pour possession de quelques grammes d’herbe. Ils ne passent qu’une nuit en prison, mais cet évènement provoquera une large réaction en leur faveur, jusque dans la presse conservatrice. Dès l’annonce de leur arrestation, les Who enregistrèrent deux thèmes signés Jagger-Richard, à leur bénéfice. Brian Jones ne se relèvera jamais vraiment de ces incidents et abandonna progressivement le groupe. Il ne participera qu’épisodiquement aux albums parus après 1967, remplacé – dit-on – parfois par Dave Mason, Eric Clapton et surtout Mick Taylor, qui deviendra Rolling Stone à part entière en juin 1969. Son arrivée devait coïncider avec un regain d’intérêt pour le blues – ce qui est normal si l’on considère qu’il venait de passer plusieurs années avec John Mayall. Cette année 1969 sera l’une des plus dramatique pour les Stones : suicide de Brian Jones en juillet, meurtre d’un spectateur pendant leur concert d’Altamont, en novembre en Californie. Pourtant l’album live « Get Yer Ya-Yas Out », enregistré en novembre à New York, reste un des meilleurs témoignages de leurs prestations scéniques.
En 1971, ils quittent Decca pour fonder leur propre label – Rolling Stones Record – sur lequel ils sortent au moins deux superbes albums, notamment Sticky Fingers. Mais à partir de 1974, et alors que Mick Taylor s’en va (il sera remplacé par Ron Wood), la musique semble baisser en qualité comme en feeling. Un peu de la magie est partie. Restent une vingtaine d’albums studios, quelques films, et le souvenir d’un groupe qui a bouté le feu à beaucoup de révoltes adolescentes, grâce à un showman extraordinaire, Mick Jagger, et grâce au blues. Les Stones seront introduit au Rock and Roll Hall of Fame en 1989.
Out of Our Heads (1965) : Les titres ont été enregistrés entre l’automne 1964 et l’été 1965 et présentent autant de compositions originales que de reprises de rhythm and blues et de rock ‘n’ roll. La réédition en CD a réuni les titres des deux éditions. L’album en version U.S. contient le fabuleux « Satisfaction » dont voici l’histoire :
Le 7 mai 1965, Keith Richards se réveille au milieu de la nuit avec une mélodie dans la tête. Il est dans une chambre au Gulf Motel à Clearwater, en Floride. Sa guitare est posée sur le lit à côté de lui. A taton, dans l’obscurité, il trouve son enregistreur portatif à cassette sur la table de nuit. Il pousse le bouton d’enregistrement et joue un riff de huit notes. Il l’accompagne d’une ligne vocale murmurée, « (I Can’t Get No) Satisfaction (Je ne peux trouver aucune satisfaction) ». Puis il se rendort. « Sur la bande, vous pouvez m’entendre m’affaler sur le lit », confirme Richards. « Le reste de la bande, c’est moi en train de ronfler. » Le morceau est enregistré une première fois le 10 mai 1965 aux Chess Studios à Chicago puis deux jours plus tard aux RCA Studios à Los Angeles. Au départ, Keith Richards ne voulait pas mettre d’effet de saturation sur le riff (il aurait préféré une section de cuivres). Ce sont finalement le manager des Stones, Andrew Loog Oldham et l’ingénieur du son David Hassinger qui poussèrent le groupe à sortir cette chanson en single, avec le fuzz sur la guitare de Keith Richards. Le 19 juillet 1965, le single est certifié or par la RIAA aux États-Unis pour s’être vendu à au moins 500 000 exemplaires. Jamais Keith Richard n’aurait imaginé que cette chanson qu’il pensait avoir piquée à Martha and the Vandellas, deviendrait une des plus connues de l’histoire du rock. En 2003, la chanson a été classée 2ème plus grande chanson de tous les temps par le magazine Rolling Stone.
Aftermath (1966) : le quatrième album des Stones, produit par Andrew Loog Oldham. C’est le premier album qui ne comprend aucune reprise et que des chansons originales. Cet album est souvent considéré comme l’un des meilleurs albums de tous les temps ; il contient notamment « Lady Jane » et « Under my Thumb ». En dépit des conflits opposant le groupe au producteur de l’album quant au contenu du disque, celui-ci se classe n°2 dans les charts américains et devient même disque de platine.
Beggars Banquet (1968) : Brian Jones est pratiquement absent de cet album qui renoue avec le blues après les errances de « Satanic Majesties » et « Between the Buttons ». Les Stones ont des invités de marque et entament une collaboration avec le pianiste Nicky Hopkins. A ceux qui les accusaient de satanisme, ils répondent par « Sympathy For The Devil ». Et au pacifique « Revolution » des Beatles fait écho le bouillant « Street Fighting Man » (ou comment se faire une réputation de groupe « révolutionnaire »). L’album remporte un énorme succès ; il se classa à la 3ème place des charts britanniques et à la 5ème place du Billboard 200 aux États-Unis. En France, il atteindra la première place des charts dans lesquels il restera classé pendant 93 semaines.
Sticky Fingers (1971) : Le premier album sous leur nouveau label avec une célèbre pochette signée Andy Warhol. Et peut-être l’un de leur plus réussis. L’esprit du blues est toujours très vivant, en particulier dans « Sister Morphine » morceau dans lequel Ry Cooder joue de la slide guitar. Titre phare de l’album, « Brown Sugar » est appuyé par le saxophone de Bobby Keys. Cette chanson qui parle ouvertement de drogue reste aujourd’hui un des standards du groupe. L’album fut numéro 1 aux États-Unis et numéro 2 au Royaume-Uni. Mais les Stones commencent à parodier leur propre réputation, à trop capitaliser sur leur « rôle » de mauvais garçons. Bien que Sticky Fingers soit un excellent album, les Stones – leurs personnages et leur musique – commencent déjà à devenir une institution, faisant ce que l’on attend d’eux.
Discographie :
1964 : The Rolling Stones
1965 : No. 2
1965 : Out of Our Heads
1966 : Aftermath
1967 : Between the Buttons
1967 : Their Satanic Majesties Request
1968 : Beggars Banquet
1969 : Let It Bleed
1971 : Sticky Fingers
1972 : Exile on Main St.
1973 : Goats Head Soup
1974 : It’s Only Rock ‘n Roll
1976 : Black and Blue
1978 : Some Girls
1980 : Emotional Rescue
1981 : Tattoo You
1983 : Undercover
1986 : Dirty Work
1989 : Steel Wheels
1994 : Voodoo Lounge
1997 : Bridges to Babylon
2005 : A Bigger Bang
2016 : Blue & Lonesome